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Biographie

Allocution à la remise des insignes dans l’ordre national de la légion d’honneur le 2 juillet 2019



A Madame, la Ministre des solidarités et de la santé,
A mon parrain ou ma marraine qui a souhaité garder l’anonymat,
A Madame le Directeur Central du Service de santé des Armées, Chère Maryline,
Mesdames et Messieurs les médecins généraux,
Mesdames et Messieurs les professeurs des Universités,
Mesdames et Messieurs les Présidents d’Associations, Chère Geneviève, Chère Marie-Claire, Cher Aimé et cher Hervé, Mesdames et Messieurs les Editeurs,
Chers Collègues, Chers Amis,
Chère Famille, ,

C’est une intense émotion et une grande joie, Madame la Ministre qui m’ont envahie à la lecture de votre décision de me nommer au grade de Chevalier dans l’ordre national de la Légion d’Honneur. Devant cette prestigieuse marque de reconnaissance, je vous adresse mes plus sincères remerciements.
Je suis particulièrement touchée d’être aujourd’hui dans un des salons du Ministère des Solidarités et de la santé.
Je suis très honorée que vous me remettiez personnellement ces insignes. Je ressens bien le privilège que cela représente, alors que votre emploi du temps est si dense. Je voudrai vous exprimer toute ma gratitude.
J’attribue cette magnifique décoration républicaine à mon investissement dans les établissements publics hospitalo-universitaires et aussi au sein de diverses associations, toujours dans le but d’aider les autres depuis plus de quarante années.
J’ai eu le bonheur tout au long de ce chemin, de faire de belles rencontres malgré l’obstacle de mon handicap visuel. Nombreux sont celles et ceux qui ont cru en moi, partagé mes projets, mes idées, mes valeurs. Je les remercie tous, qu’ils soient présents ou qu’ils aient disparus. Ils ont enrichi mon histoire personnelle et contribué à rendre mon investissement militant. Si ce soir, vous êtes à mes côtés, c’est parce que depuis longtemps ou plus récemment, nous avons travaillé ensemble et pu nous apprécier mutuellement.
Ce soir, nous célébrons donc une histoire commune et c’est un plaisir pour moi de vous la raconter :
Mes premières pensées émues et fières, vont particulièrement à mes parents qui nous ont inculqués les valeurs du travail, de l’honnêteté, du respect, de la modestie, de la fidélité. Ces valeurs solides ont continué à me guider. Avec une grande intelligence, ils ont su canaliser mon énergie tout en favorisant ma curiosité, mon esprit d’entreprise et ma créativité Alors, cette médaille, vous comprendrez que c’est d’abord à eux que je souhaite la dédier.
Je suis heureuse de voir toute ma famille ici rassemblée. Cette médaille est donc aussi la vôtre, vous qui avez su me soutenir avec patience et indulgence :
A Jean-Claude, mon mari, à Pierre-Yves et Jérôme mes enfants. Elle est aussi à vous mes sœurs, à mes neveux et nièce et à tous mes proches présents physiquement ici, ou par la pensée.
Mon histoire de vie a commencé dans une famille aimante, adepte de l’ouverture sur des apprentissages multiples et variés. Ainsi, dans le cadre de structures offertes par la municipalité, j’ai eu la chance d’apprendre la musique, la danse, les arts plastiques, et de pratiquer de nombreuses activités sportives.
Je voudrai tout d’abord rendre hommage à l’école de la République, à mes instituteurs, à mes professeurs du collège puis du lycée Hélène Boucher De Paris dont j’ai admiré l’excellence, la qualité de l’enseignement et leur disponibilité au service de leurs élèves. Ils ont façonné ma manière de penser, de raisonner, et m’ont donné le goût d’étudier.
Je garde à jamais dans mon esprit la photo d’Hélène Boucher accrochée dans le hall de cet établissement imposant, son regard, son sourire à bord de son avion, seront pour toujours des témoins de l’exemplarité.
Inscrite en faculté de médecine à Paris, un premier événement change ma trajectoire de vie ; certains y verraient sûrement aujourd’hui un présage, un signe de la destinée.
L’une des élèves de ma classe de terminale, que j’oserai dire aujourd’hui phobique des transports en commun me demande de l’accompagner en dehors de Paris, dans un centre d’examens pour passer un concours auquel elle tient vraiment, celui d’entrée aux écoles du service de santé des armées. Pour être totalement présente, je m’inscris également aux épreuves.
Déjà par cet accompagnement amical, s’ébauchait peut être mes futures prises en charge de patients phobiques en tous genres. Le concours passé nous sommes toutes deux admises. J’intégrerai l’école du service de santé des Armées de Lyon.

C’est le commencement de la période bleue, non pas celle de l’illustre peintre Picasso, mais tout simplement celle de la couleur de nos uniformes d’élèves officiers, puis d’officiers. Notre devise « pro patria et humanitate », gravée sur nos blasons et brodée sur notre drapeau sera toute notre fierté. J’aurai le bonheur d’y rencontrer des femmes et des hommes, merveilles d’engagement, de motivation, et d’humanisme.
Je remercie Maryline pour son amitié indéfectible depuis l’école des santards de Lyon, que j’apprécie tout particulièrement pour sa simplicité, sa bienveillance, et son intelligence toujours si vive.
Au cours de ces études médicales, mon intérêt est permanent pour la compréhension des mécanismes du vivant. J’entreprends un travail de recherche dans un laboratoire de physiologie au sein du CRSSA de Lyon sur le « coup de chaleur », combien d’actualité dans cette période actuelle de canicule !
Je remercie tous ces chercheurs qui m’apprendront la rigueur, le sens de l’analyse, et l’exploitation des données scientifiques et me porteront jusqu’à l’obtention de deux prix de thèse.
Fin 1983, un second événement infléchi de nouveau ma trajectoire de vie, je suis grièvement blessée au cours d’un accident de la voie publique, le handicap visuel séquellaire est majeur. Je dois quitter le ministère de la défense et je reprends mes études médicales vers une autre spécialisation.
C’est ce que je nomme la période blanche. Le blanc du manque, de l’interruption, mais aussi le blanc de la paix, à faire avec moi-même, puis avec les autres.
Je remercie toutes les structures associatives pour déficients visuels, sans l’aide desquelles je n’en serais pas là aujourd’hui ;
tout particulièrement le G.I.A.A. dont le président de l’époque Mr Gouarné me propose une rééducation individuelle et accélérée en quelques mois.
Je remercie leur personnel salarié et bénévole dont l’aide hebdomadaire à été primordiale pour suivre au mieux mes études et passer mes examens et concours. J’adresse mes remerciements à toutes ces personnes généreuses de cœur qui m’ont données sans compter. Je souhaite adresser des remerciements particuliers à Mme Michèle Courcy, qui depuis vingt ans m’accompagne dans la plupart de mes activités, parcourt le monde avec moi y compris dans des pays pas toujours très hospitaliers, merci Michèle, pour votre dévouement, votre enthousiasme et votre disponibilité.

Je tiens à remercier aussi la fédération des aveugles de France qui m’a accordée toute sa confiance en me demandant de représenter la France au premier colloque européen dédié aux femmes handicapées visuelles qui s’est tenu en Italie en 1986. De cette expérience fondatrice, j’ai eu l’honneur de faire partie d’un groupe de travail européen cordonné par l’union européenne des aveugles pendant une dizaine d’années. J’y ai rencontré des femmes aux parcours d’exception : courageuses, innovantes, au service de l’insertion sociale et professionnelle. La f.a.f me renouvelle sa confiance en me proposant en 1997, comme représentante de l’union européenne à l’union mondiale des aveugles. L’ensemble de ces contributions m’amène à coordonner un travail de synthèse sur le territoire national concernant la vie quotidienne des femmes handicapées quel que soit leur handicap.
Un ensemble de propositions concrètes seront rassemblées dans un livre blanc remis à madame la secrétaire d’état en charge… des femmes en mai 2000.
Ainsi, cette médaille est aussi celle de tous ceux qui ont partagé mes engagements associatifs

Une troisième période, s’ouvre, la période rouge, le rouge de la passion, pour un métier celui de psychiatre.
Ce chemin merveilleux, de la connaissance humaine, a pu se faire grâce à certaines personnes, que j’aimerai saluer vivement ce soir :
Je témoigne toute mon admiration aussi bien pour leur savoir que pour leur écoute et leur grande humanité aux médecins généraux Pierre Lefebvre, Maurice Bazot et Claude Barrois. Grâce à leurs conseils éclairés je décide de finaliser une spécialisation en psychiatrie, découverte quelques mois plus tôt au cours de l’externat.
Mes remerciements vont aussi à Mr le Pr Pierre Deniker, dont la prestance, l’autorité et le rayonnement scientifique me permettront de « décrocher » une inscription à l’université rendue bien difficiles du fait de mon handicap.
Je souhaite exprimer ma reconnaissance à Mr le Professeur Bertrand Samuel-Lajeunesse, il m’accueillera dans son service universitaire de la C.M.M.E dans le Centre hospitalier Sainte-anne.sa curiosité, son esprit d’ouverture, l’amèneront à accepter la direction de mon mémoire de spécialité sur l’apport du yoga en psychiatrie. Je suis venue au yoga grâce à mes parents « un esprit sain, dans un corps sain »disaient-ils. Le yoga me sera d’une grande utilité dans la gestion de mes émotions. Certes, il ne s’agit pas d’une thérapie, mais d’un apport fondamental dans l’équilibre de soi.
Je souhaite saluer également ce grand visionnaire me suggérant de me spécialiser vers des psychothérapies toutes nouvelles, peu connues en 1985, les psychothérapies comportementales et cognitives qui depuis ne cessent de démontrer leur efficacité.
Il m’a toujours soutenu, encouragé et poussé au dépassement de moi-même. En 1991, je prends mes fonctions de praticien hospitalier dans ce même service, rattaché à l’université Paris V René Descartes. Il me confie la direction d’une unité fonctionnelle de psychothérapie que je coordonne toujours aujourd’hui sous la direction de Monsieur le Pr. Philippe Gorwood.
je remercie Mr le Dr François Lelord et Mme Mélinée Agathon, pionniers français des TCC qui me permettent tous deux d’approfondir mes connaissances, et ma pratique. Ils me feront l’honneur de me superviser pendant plusieurs années. Leur intelligence, leur savoir immense, leur sens de la méthode m’ont toujours impressionnée.
Je m’investis dans l’association toute naissante des T.C. au sein de la commission d’enseignement, puis du conseil d’administration. Je remercie encore tous les membres actifs dont ceux qui me porteront à la fonction de présidente de l’AFTCC de 2001 à 2003. Je salue le dynamisme de notre association professionnelle, ses exigences de qualité à l’égard de la formation des thérapeutes et de son ouverture européenne.
La société médico-psychologique m’accompagne également dans tout ce parcours, membre correspondant national, puis membre titulaire de cette société savante de psychiatrie, la plus ancienne au monde.
Je rends hommage à Monsieur le Pr Julien-Daniel Guelfi qui me permettra d’accéder à la vice-présidence en 2008, puis à la présidence. Je lui témoigne également toute ma gratitude pour son enseignement et pour une riche collaboration clinique de plus de vingt ans toujours guidée par le souci d’améliorer la qualité de vie des patients.
Je rendrai hommage désormais à Monsieur Le Pr. Zindel Segal Professeur de psychologie à Toronto, fondateur des thérapies comportementales et cognitives basées sur la pleine conscience (ou Mindfulness Based Cognitive Therapy), avec Messieurs les Professeurs Williams et Teasdale. Je le remercie de m’avoir donné l’opportunité de suivre la première formation européenne en 2002, rassemblant des praticiens universitaires sensibilisés à la méditation. Il m’a encouragé dès 2013, à former sur le territoire national mes collègues, selon un programme universitaire validé. Je peux apprécier sa grande disponibilité, ses conseils pertinents et sa chaleureuse courtoisie. Il m’a aidé au développement de ce nouvel outil de soins aussi bien, dans la prévention des rechutes dépressives que dans la prévention du burn out des soignants.
Cette médaille je veux donc aussi la partager avec tous mes Maîtres.


Pour compléter ces actions de terrain, j’ai allié l’écriture. J’ai toujours aimé écrire et dès l’adolescence, j’envoyai chaque jour des lettres aux amis, ce qui stupéfiait mes parents. Il faut dire qu’il n’y avait pas encore internet, ni les réseaux sociaux et j’ai donc beaucoup fait fonctionner la poste !
Je remercie Mr le Professeur Alain Blanchet avec lequel j’ai travaillé de nombreuses années à l’université de psychologie Paris VIII, qui m’a amené à l’écriture scientifique. J’ai eu depuis vingt ans, du plaisir à écrire de nombreux ouvrages, manuels, livres d’auto-aide, afin de transmettre une expérience et un savoir pratique accessibles à tous. Je remercie vivement les confrères avec qui j’ai partagé l’écriture d’ouvrages à quatre mains ou plus, Luis et Isabelle pour le plus grand nombre mais aussi Aurélie, Loretta, Nayla, Eryc et Claude.
Je rends hommage aux éditeurs des Maisons Dunod, et Odile Jacob grâce à qui cette aventure se poursuit encore aujourd’hui.
Enfin, je remercie tous mes confrères qui ont couplé leurs enseignements avec les miens pour faciliter mes déplacements en métropole, en Outre-Mer ou à l’étranger. Je vous remercie tous, Aurélia, Aurélie, Luis, Eryc et les autres pour votre générosité, pour votre gentillesse, et pour tout l’enrichissement que vous m’apportez ; je veux vous dire ma gratitude et vous offrir à tous cette décoration.
Antoine de Saint-Exupéry ne disait-il pas : « Celui qui diffère de moi, loin de me léser, m’enrichis ».
Pour conclure : ces postes successifs, ces missions multiples, ces fonctions variées ont toutes eu un point commun : changer le regard sur les maladies psychiques et sur les personnes en situation de handicap. Développer le bien-être émotionnel et les compétences psychosociales, identifier précocement les signes de rechutes ont été au coeur de mes actions. Pour atteindre ces buts, mes trois fils conducteurs de vie se sont entrelacés continuellement, tissant entre le bleu, le blanc et le rouge, une tresse républicaine souple et bien solide dédiée aux autres. J’ai à cœur de partager ces trois piliers fondamentaux de ma propre construction avec ferveur et joie. Je m’engage, Madame la ministre, à poursuivre ce chemin avec force, empathie et détermination que je puiserai dans le rouge de ce ruban.
Merci pour votre aimable écoute.


La reconnaissance du handicap. Ministère de la santé.

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